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UN PRISONNIER DE GUERRE N’EST-IL PAS UN RÉSISTANT ? Pour le Muséum de Paris c’est Niet ! circulez il n’y a rien à voir…

Le député franco-marocain M’djid El-Guerrab et auteur du coup de boule à coups de casque de scooter, qui a envoyé un cadre socialiste en soins intensifs, a adressé tout récemment un courrier au président du Muséum de Paris, Mr Bruno David, qui lui a répondu de manière superflue. 

L’intervention du député M’jid El-Guerrab est élégante, tout comme la requête des historiens parue dans le journal Le Monde il y a quelques mois. 
L’intervention du député M’jid El-Guerrab contraste singulièrement avec le silence abyssal des sénateurs et autres députés algériens qui ont pris de la distance vis-à-vis de cette affaire du Muséum de Paris. A ce jour aucun d’eux ne s’est jamais manifesté, depuis le mois de mars 2011, date à laquelle j’ai fait cette découverte au Muséum de Paris, aucun d’entre eux n’a bougé le petit doigt. Ils sont tout simplement plus préoccupés de leurs intérêts individuels et des avantages qu’ils peuvent tirer de leur position dominante.

Cela m’amène à parler de la dernière saillie de Bruno David, le président du Muséum de Paris, en réponse à la lettre de M’Jid El Guerrab. 
Selon Bruno David seuls six cranes sur les 34 contenus dans la collection appartiennent aux résistants… 

Apparemment le président du Mésum de Paris (ex-MNHN) maîtrise mal les fondements de cette affaire. En outre il est assez fâcheux que Mr Bruno David ne puisse pas établir le lien entre un résistant, un partisan qui participe à une action de force contre un occupant étranger de son pays, et le même résistant, qui, lorsqu’il est arrêté les armes à la main devient : un prisonnier de guerre. 

Voici quelques exemples de prisonniers de guerre, c’est-à-dire des RESISTANTS arrêtés lors de batailles les opposant aux soldats du Corps expéditionnaire français, puis décapités par l’armée française. Leurs ossements se trouvent depuis plus d’un siècle au Muséum de Paris (ex-Muséum National d’Histoire Naturelle, appelé « Société d’Anthropologie de Paris » au XIX° siècle) : (références : « MNHN-HA-299. Mohamed ben Hadj Crâne de Mohamed ben Hadj, âgé de 17 à 18 ans, Kabyle de la grande tribu des Béni-Menacer, prisonnier de guerre, mort à Alger le 8 mai 1843, don Flourens, coll. Guyon, chirurgien de l’armée d’Afrique », selon le MNHN. Collection Guyon ». 

Un autre résistant : « MNHN-HA-3874. Crâne de Mohamed ben Siar, Kabyle de la tribu des Issers. Don Flourens, coll. Guyon, chirurgien de l’armée d’Afrique Archives : « … Kabyle né dans la tribu des Issers (Est de la Mitidja), Mohamed ben Siar, mort prisonnier de guerre à l’hôpital du Dey, le 13 juin 1837… » Collection Guyon ».

D’autres encore : 
(MNHN-HA-33653. Eddine ben Mohammed tué en 1895, « un des premiers insurgés, meurtrier du Lieutenant Weinbrenner en 1881, don Dr Beaussenat à la Société d’Anthropologie de Paris » . 
Et encore un autre : « MNHN-HA-6962 . Crâne de Salem ben Messaoud, « Arabe des environs d’Alger don Flourens, coll. Guyon, chirurgien de l’armée d’Afrique. » Archives : « Tête de Salem ben Meçaoud, Arabe des environs d Alger, mort à l’hôpital le 6 Décembre 1838, venant de la prison Militaire. Cet homme, qui passait pour avoir volé, avait été envoyé à l’hôpital avec de profondes plaies gangréneuses aux fesses, suite d’une bastonnade qu’il avait reçue un mois auparavant. » (« Notes sur les têtes d’indigènes envoyées à M Flourens par le courrier parti d’Alger le 4 mai 1839 ») Collection Guyon ». 

Ce dernier a été torturé. Un grand nombre de résistants sont morts de sévices, d’actes de tortures comme leurs lointains descendants durant la guerre de libération 1954/1962, on connait les « hauts faits guerriers » d’Ausaresses, Bigeard, Massu, à la villa Sesini et dans les caves de l’intendance à Alger, sauf qu’il n’y avait pas encore la gégène à l’époque, on décapitait les têtes avant de les expédier au Muséum de Paris. 

Les données numérisées dans la base de données du Muséum de Paris, sont suffisamment éloquentes, et il semblerait qu’elles aient échappé au discernement et à l’intelligence du président du Muséum. Ce que je rapporte ici, ce sont les collectionneurs eux-mêmes qui l’affirment dans leurs lettres qui datent des premiers temps de la colonisation, j’ai les copies de ces lettres en ma possession. Elles sont publiées en annexe de mon livre « Boubaghla le sultan à la mule grise. La résistance des Chorfas », qui est paru aux Éditions Thala. Alger 2015.

Que dire de plus au président du Muséum de Paris ? 

Nier à ces martyrs leur qualité de RESISTANTS, cela revient à les traiter de Bandits… 

On a vu cela durant la guerre d’indépendance -1954/1962- lorsque les Français traitaient les résistants algériens de bandits et de brigands. Il suffit de consulter les journaux de l’époque, de lire les tracts de l’armée française. On ne les considérait pas comme des prisonniers de guerre, ils étaient traités comme de vulgaires détenus de droit commun. Avant le président du Muséum de Paris (ex-MNHN), Michel Guiraud, directeur des collections du Muséum d’histoire naturelle, avait déjà minimisé le nombre de crânes appartenant à ces résistants algériens. Par ailleurs il est inconvenant que l’on puisse mettre en avant quelques supplétifs algériens morts au service de la France, dont les ossements sont conservés au Muséum. Leur nombre est vraiment insignifiant. 
La France n’est pas encore libérée de ses illusions coloniales.

Belkadi Farid Ali