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“Une nouvelle ère s’annonce”, Amel Djenidi, curatrice de Wide Shot, Alger 2022.

Amel Djenidi, curatrice de l’événement Wide Shot, les journées arts vidéo d’Alger organisées par l’Espace Divali art network, répond aux questions du site founoune.com. Amel Djenidi est actuellement doctorante à l’Université de Paris et de Mostaganem, elle est designer graphique et vidéaste. La vidéo reste son médium favori et de prédilection. Elle est diplômée de l’Ecole supérieure des Beaux-arts d’Alger en 2007, de l’académie de Brera à Milan et titulaire d’un magister en sciences de l’art depuis 2012. Elle a été enseignante à l’Ecole supérieure des Beaux-arts d’Alger (2012-2016) et à l’Ecole nationale de conservation et de restauration des biens culturels (2012 à ce jour). 

Founoune : Vous êtes curatrice d’un événement très singulier qui se prépare pour la rentrée, les journées art vidéo d’Alger, Wide Shot, peut-on en savoir davantage ?
Amel Djenidi : C’est effectivement un événement rare sur la scène algérienne. Nous sommes habitués à des manifestations assez classiques dirait-on et pour cette première édition, nous projetterons des vidéo d’art qui seront libre d’accès à tout public. Un événement entièrement dédié à l’art vidéo.

Founoune : C’est ce qui a motivé le choix de la vidéo ?
Amel Djenidi : La vidéo est un art actuel mais aussi très marginalisé dans notre société. De par sa rareté, il en devient un objet d’étude très intéressant. L’image en mouvement apporte une dimension supplémentaire aux arts plus traditionnels, plus conventionnels. A elle seule, elle est image, son, mouvement, temps, décor, scène, cadre, ambiance, profondeur. L’art vidéo est également le sujet de ma thèse doctorale sur sa pratique, sa diffusion et sa réception.

Founoune : Pourquoi avoir choisi le thème du jeu pour cette première édition ?
Amel Djenidi : Le jeu peut être vu comme une opposition à la vie quotidienne, à la réalité ou au sérieux. Pourtant la frontière est bien mince. Le jeu dans une dimension universelle, relève de la condition humaine. Le jeu peut se présenter sous différentes formes de mises en scène, de stratégies ou encore de métaphores. Ce thème est pour le moins ouvert tant les possibilités sont infinies. Cela laisse le champ libre aux vidéastes de créer leurs propres règles. En effet, dans cette édition, la latitude est étendue sans pour autant être dépourvue de sens.

Founoune : Depuis le lancement de l’appel, peut-on avoir une idée sur les participants ?
Amel Djenidi : Après deux ans de pandémie mondiale, il était risqué de se lancer dans une telle aventure. Néanmoins, le taux de participation pour une première édition est assez conséquent et dépasse nos frontières. Il y a des vidéastes algériens, français, serbes, tunisiens et espagnols. Certains grands noms se sont naturellement intéressés et d’autres jeunes ont apporté un angle de vue d’une fraîcheur tout à fait plaisante. Toutes les informations concernant les participants, la programmation et les lieux de diffusion seront communiquées dans le dossier de presse.

Founoune : La vidéo est le format de contenu préféré en ligne et en croissance permanente en Algérie et dans le monde, les dernières statistiques affirment que plus de la moitié des internautes utilisent le web pour regarder des vidéos, quel est la raison de l’absence de ce médium dans les monstrations et chez les artistes Algériens ?
Amel Djenidi : Ce constat est d’autant plus déroutant quand on connaît la facilité actuelle d’acquisition de matériel, ce qui n’était pas le cas il y a à peine trois décennies. Pour l’utilisation des nouvelles technologies, ne serait-ce que par smartphones ou encore de la liberté de diffusion incroyable qu’est le web. Des milliers de contenus vidéo sont diffusés quotidiennement sans toutefois revêtir de concept artistique. Les artistes sont souvent confrontés à un choix ardu : la vidéo demande beaucoup de temps pour peu de rentabilité. C’est finalement un produit d’exhibition plus qu’un produit de vente. Ce fragile médium n’est pas encore prêt à se faire une place alors que des dispositifs existent.

Founoune : On imagine que cette édition est le début d’une belle aventure ?
Amel Djenidi : Il faut un début à tout ! Cependant, le challenge demeure toujours dans la pérennité d’un événement. Je peux vous dire que d’ores et déjà, la réflexion pour la seconde édition a débuté.

Founoune : Que pensez vous de la couverture médiatique réservé à wide Shot ?
Amel Djenidi : La presse en général n’a plus la même audience qu’il y a quelques temps. Avec le numérique, nous assistons à la disparition de beaucoup de journaux. Qui lit encore un journal de nos jours ? C’est une étude à faire. Outre cet aspect, le net et les réseaux sociaux apportent cette rapidité nécessaire à renseigner sur un événement. Par le fait que l’art vidéo soit encore une fois un médium ignoré, même sa promotion en devient laborieuse. Qui va s’intéresser à une initiative privée d’un support non-conformiste ? Tel est le défi qui attend ces journées d’art vidéo d’Alger 2022.

Founoune : Un dernier mot ?
Amel Djenidi : Une nouvelle ère s’annonce.

 

Propos recueillis Mr Ouamer-Ali Tarik
le 30 Mai 2022