intra-muros :
Accueil > arts visuels > Wide Shot 2022 : Interview de Zoulikha Bouabdellah – مقابلة مع زليخة بوعبدالله 

Wide Shot 2022 : Interview de Zoulikha Bouabdellah – مقابلة مع زليخة بوعبدالله 

Diplômée de l’Ecole nationale supérieure d’arts de Paris-Cergy en 2002, Zoulikha Bouabdellah est l’invitée de l’édition de Wide Shot 2022, c’est une artiste plasticienne qui explore aussi bien les installations que la vidéo. Elle a reçu 3 distinctions aux émirats, en Afrique du sud et en France entre 2005 et 2009. Elle a participé à 22 festivals de vidéo et plusieurs expositions collectives de Dakar, à Paris, en passant par Bamako, Lille, Düsseldorf, Tunis, Vienne, Tokyo, Beyrouth, Boston, Venise, Alger, Salerno, New York, Sanaa, Houston, Doha, Rabat, Casablanca, Frankfort, Savannah, Bruxelles, Metz, Palma, San Sebatian, las palmas canaries, Sharjah, Sète, Marrakech. 12 expositions personnelles ont eu lieu en France, au Maroc, en Espagne et aux Emirats arabes unis. Son travail interroge les représentations politiques, de genre, culturelles à travers une déconstruction des mots et des motifs. A l’occasion des journées d’art vidéo d’Alger, elle animera une rencontre-débat avec les étudiants de l’Ecole Supérieur des Beaux-Arts d’Alger.

Votre démarche artistique repose en partie sur le principe de l’installation où la vidéo tient une place particulière. Comment s’est opéré ce choix ?
L’installation est une forme d’expression singulière. Elle doit tenir compte de l’espace non seulement comme lieu dont il convient de s’emparer mais aussi comme un protagoniste avec lequel il faut composer. Une installation ne peut donc être un espace neutre. J’y trouve un autre intérêt en cela qu’elle invite à utiliser des matériaux, médiums et éléments de différentes natures formelles et matérielles. Cela dit, cet espace de manifestation de soi se confronte à une difficulté d’importance et j’imagine inhérente à toute œuvre de création : créer un dialogue entre les éléments composant le lieu et le visiteur. Il faut que l’installation nous invite à pénétrer dans un espace de conversation avec l’artiste et le monde.

Lors des premières années de votre parcours, vous aviez une production picturale. Avez-vous renoncé à ce médium ?
Je n’ai renoncé ni à l’installation vidéo ni à la création vidéo. Ces formes d’expression demandent une énergie supplémentaire et très prenante, celle de demande de subvention. Ce préambule ôte malheureusement une certaine spontanéité que l’on retrouve face à une simple feuille de papier et dont l’artiste souvent a besoin. Je me consacre en ce moment à l’écriture qui je suis persuadée aboutira à des réalisation de vidéo artistiques.

Dans votre vidéo Perfection takes time, vous présentez une œuvre en deux temps avec une discordance voulue entre l’image et le son. Pourquoi ?
J’ai réalisé cette vidéo au Yémen, à Sanaa, en 2014. J’ai vu cette femme danser dans un pays où les femmes se déplacent d’un point à un autre en étant couvertes d’un épais volume noir. Et voilà que cette femme, qui non seulement porte sur elle de la lumière et des paillettes, se met à tourner et danser. Dans l’instant où je l’ai vue, elle est un corps libre. J’ai donc saisi ma caméra pour enregistrer ce moment fugace de subversive spontanée. La vidéo consiste en un plan séquence auquel j’ai ajouté un texte prononcé par une femme que l’on ne connaît pas. À travers le décalage entre le son et l’image se construit la distance entre ce que l’on est et le discours que l’on veut nous imposer en tant que femme.

Sur vos différentes vidéos, la thématique de la condition des femmes est récurrente. Comment ces éléments influencent-ils votre travail ?
Je ne cache pas mes convictions féministes et cela depuis le début de mon parcours avec la vidéo Dansons en 2003. Pour autant, je ne considère pas mon travail comme un slogan. Dans ma vidéo Envers Endroit, j’invite à une lecture non linéaire de l’histoire de l’art tout en interrogeant deux conceptions différentes de fabrication de l’image. Ce moyen plastique est aussi un outil avec lequel j’oriente le regardeur, avec l’intérêt de ne plus faire de l’homme le seul modèle de la subjectivité.
Dans le registre de l’histoire de l’art, on peut considérer qu’un corps libre est celui qui se meut contrairement à l’odalisque immobile et passive. Dans le cadre de la création, le processus vers la manifestation de ce qui existe induit un redoublement de soi. Pour conclure, je pense que la condition des femmes est une matière et une manière de «manifester son moi», comme le levier qui permet de transformer l’invisible en visible. C’est l’action de paraître ou comme le dit Louise Bourgeois elle-même : l’action d’exister.

Dans vos œuvres vous utilisez des éléments graphiques et textuels en arabe. La question identitaire est-elle cruciale ?
Avant d’arriver en France en 1994, je me considérais comme une jeune femme, point. Le déplacement de l’Algérie vers la France m’a obligé à reconsidérer ma personne. C’est un travail d’introspection que le voyage a provoqué en moi et qui continue de m’interroger en tant qu’artiste, mais aussi en tant que citoyenne. J’ai réalisé également qu’il me fallait assumer ce que je représente à cause du lieu d’où je viens, de la sonorité de mon nom, de mon genre, de ma couleur de peau et du lieu où on recommence une nouvelle vie. Moi qui vivais en France depuis huit ans seulement, pas encore naturalisée, je me suis retrouvée malgré moi mêlée à l’histoire de l’immigration nord-africaine. Elle allait devenir mon histoire, uniquement parce que je suis une Algérienne, une femme typée. Dansons est une réaction, une action positive et pacifique qui tient à démontrer que j’assume être maghrébine comme l’on dit en France, mais que je ne me réduis pas à ça et que c’est à moi de décider qui je veux être. Je suis une femme, tantôt arabe, tantôt française, tantôt musulmane, tantôt européenne, je suis ce que je veux être. C’est moi qui décide comment me présenter au monde. Et cette démarche je l’entreprends en dansant sur la Marseillaise qui est une marche aux tonalités plutôt martiales. Je combine la verticalité de la Liberté guidant le peuple avec les courbes du mouvement de ma danse. Enfin, j’en arrive au corps. Mon corps comme objet et sujet de la vidéo. Je dois préciser que je n’utilise pas les mots arabes afin de revendiquer mes origines ou pour imposer une quelconque facette de mon identité. J’aime utiliser cette langue pour ses qualités graphiques, formelles et poétiques. L’écriture arabe possède une force plastique et c’est pour cette raison que des artistes l’utilisent, même ceux qui ne sont pas natifs de la culture arabo-musulmane. Dans sa structure même, les lettres, les racines, les mots, les déclinaisons, la graphie arabe est naturellement ouverte à la variation des formes, des sens et des émotions. J’ai trouvé avec elle le moyen adéquat de lire et de voir certains des différents stades de l’état amoureux : attraction, jouissance, bonheur ou au contraire éloignement, déplaisir, souffrance.

Propos recueillis par Amel Djenidi
Source : Catalogue Wide Shot 2022
Les journées d’art vidéo d’Alger, du 21 au 26 oct 2022

 

مقابلة مع زليخة بوعبدالله 

يعتمد أسلوبك الفني جزئيًا على مبدأ المُنشَأة حيث يحتل الفيديو مكانة خاصة. كيف تم هذا الاختيار؟

المُنشَأة هو شكل فريد من أشكال التعبير. يجب أن تأخذ في الاعتبار الفضاء ليس فقط كمكان يستدعي الاستيلاء عليه ولكن أيضًا كبطل يجب التعامل معه. لذلك لا يمكن للمُنشَأَة أن تكون فضاءً محايدًا. أجد بها اهتمامًا آخر هو كونها تدعو إلى استخدام المواد والوسائط والعناصر ذات الطبيعة الشكلية والمادية المختلفة. ومع ذلك، فإن فضاء التعبير عن الذات هذا يواجه صعوبة كبيرة وأتخيل أنها متأصلة في أي عمل إبداعي، غايته خلق حوار بين العناصر المكونة للمكان والزائر. يجب أن تدعونا المُنشَأة للدخول في فضاء محادثة مع الفنان والعالم

خلال السنوات الأولى من حياتك المهنية ، كان لديك إنتاج مُصَور. هل تخليت عن هذا الوسيط؟

لم أتخل عن مُنشأة الفيديو أو إبداع الفيديو. تتطلب أشكال التعبير هذه طاقة إضافية وصعبة للغاية، أي طاقة المطالبة بالدعم. تزيل هذه المقدمة للأسف بعض العفوية التي نجدها عند مواجهة الورقة البسيطة التي يحتاجها الفنان غالبًا. أكرس نفسي حاليًا للكتابة مقتنعةً بأنها ستؤدي إلى إنتاج فيديوهات فنية

في الفيديو الخاص بك “الكمال يستغرق وقتًا” ، تقدمين عملًا على مرحلتين مع وجود تناقض مرغوب بين الصورة والصوت. لماذا؟

لقد قمت بتصوير هذا الفيديو في اليمن  بصنعاء،عام 2014. رأيت هذه المرأة ترقص في بلد تنتقل فيه النساء من نقطة إلى أخرى وهن مغطيات بحجم أسود كثيف. والآن هذه المرأة التي لا تكتفي بارتداء البريق والشدور بل تبدأ في الدوران والرقص. في اللحظة التي رأيتها كانت جسدًا حرًا فأمسكت على الفور الكاميرا لتسجيل هذه اللحظة العابرة من التناقض العفوي. يتكون الفيديو من لقطة متتالية أضفت إليها نصًا بصوت امرأة لا نعرفها. ومن خلال الفجوة بين الصوت والصورة يتم بناء المسافة بين ما نحن عليه والخطاب الذي يُراد فرضه علينا كنساء

في فيديوهاتك المختلفة يتكرر موضوع وضعية المرأة. كيف تؤثر هذه العناصر على عملك؟

أنا لا أخفي قناعاتي النسوية وذلك منذ بداية رحلتي مع فيديو “دعونا نرقص” عام 2003. ومع ذلك ، لا أعتبر عملي شعارًا. في فيديو آخر أخرجته  “من الخارج، من الداخل”، أدعو إلى قراءة غير خطية لتاريخ الفن بمقابلة  مفهومين مختلفين لصنع الصورة. هذه الوسائل التشكيلية هي أيضًا أداة أوجه بها المشاهد حتى لا نجعل من الرجل نموذجًا وحيدًا للذاتية

في باب تاريخ الفن، يمكننا أن نعتبر أن الجسم الحر هو الذي يتحرك، على عكس الجسم الساكن والسلبي. في إطار الإبداع، تؤدي عملية إظهار ما هو موجود إلى مضاعفة الذات. في الختام، أعتقد أن وضعية المرأة هي مسألة وطريقة “لإظهار الذات”، مثل الرافعة التي يمكنها تحويل غير المرئي إلى مرئي. إنه فعل الظهور أو كما تقول لويز بورجوا نفسها: فعل التواجد

تستخدمين في أعمالك عناصر غرافيكية ونصية باللغة العربية. هل مسألة الهوية مهمة؟

قبل وصولي إلى فرنسا عام 1994، كنت أعتبر نفسي شابة، فقط، لا غير. أجبرني الانتقال من الجزائر إلى فرنسا على إعادة النظر في شخصي. إنه عمل استبطان أثارته الرحلة في داخلي ولا يزال يستجوبني كفنانة وأيضًا كمواطنة. أدركت كذلك أنه كان عليّ أن أجسد ما أمثله بسبب المكان الذي جئت منه ورنة  اسمي وجنسي ولون بشرتي والمكان الذي نبدأ فيه حياة جديدة. أنا، التي كنت أعيش في فرنسا منذ ثماني سنوات فقط ولم أحصل على الجنسية بعد، وجدت نفسي رغمًا عني معنية بتاريخ الهجرة في شمال إفريقيا. أصبحت قصتي فقط لأنني جزائرية، امرأة نموذجية. “دعونا نرقص” هو رد فعل، عمل إيجابي وسلمي أثبت به أنني أجسد وضعي كمغاربية  كما نقول في فرنسا ، لكنني لا أختصر نفسي بذلك وأن الأمر متروك لي لتقرير من أريد أن أكون . أنا امرأة ، أحيانًا عربية ، وأحيانًا فرنسية ، وأحيانًا مسلمة ، وأحيانًا أوروبية ، فأنا ما أريد أن أكون. أقرر كيف أقدم نفسي للعالم. وهذه الخطوة أقوم بها بالرقص على لحن المارسييِّيز وهي مسيرة ذات نغمات عسكرية إلى حد ما. أنا أجمع بين الوضع العمودي للحرية الذي يقود الناس مع منحنيات الحركة في رقصتي. أخيرًا، جئت إلى الجسد. جسدي ككائن وموضوع للفيديو

يجب أن أحدد أنني لا أستخدم الكلمات العربية للمطالبة بأصولي أو لفرض أي جانب من جوانب هويتي. أحب استخدام هذه اللغة لخصائصها التصويرية والشكلية والشاعرية. الكتابة العربية لها قوة تشكيلية ولهذا السبب يستخدمها الفنانون، حتى أولئك الذين لا ينتمون إلى الثقافة العربية الإسلامية. في تركيبتها ذاتها ، الحروف، والجذور، والكلمات، والاشتقاقات، الخطية العربية منفتحة بشكل طبيعي على تنوع الأشكال والمعاني والعواطف. لقد وجدت معها الطريقة المناسبة لقراءة ورؤية بعض المراحل المختلفة لحالة الحب: الانجذاب والمتعة والسعادة أو على العكس،  الغربة والاستياء والمعاناة

 

Tradution : Bureau Borsali (Alger)